eJournals Papers on French Seventeenth Century Literature 43/84

Papers on French Seventeenth Century Literature
0343-0758
2941-086X
Narr Verlag Tübingen
2016
4384

François-Xavier Cuche, Julien Gueslin (dir.): Fénelon et son double. Strasbourg: Bibliothèque nationale et universitaire. 2015. 120 p. + illustrations

2016
Volker Kapp
Comptes rendus 117 François-Xavier Cuche, Julien Gueslin (dir.) : Fénelon et son double. Strasbourg : Bibliothèque nationale et universitaire, 2015. 120 p. + illustrations Consacrer une exposition à Strasbourg au tricentenaire de la mort de Fénelon « a quelque chose de logique » (11) parce que l’archevêque de Cambrai « incarne les origines fondatrices de l’Europe » (11) et mérite par conséquent une commémoration dans cette capitale européenne. François-Xavier Cuche explique le projet de l’exposition, intitulée Fénelon et son double, en invoquant les « deux courants que l’on associe aux origines de l’Europe de notre temps » (11), l’héritage philosophique et l’héritage chrétien, susceptibles « d’une double interprétation » (12). Bien que contestés ou plutôt surtout à cause de ces discussions, les apports de Fénelon à la pensée politique, économique, spirituelle et littéraire rendent compte « des enjeux, des tensions, des controverses, des possibles, des inventions d’un moment décisif dont nous vivons toujours les conséquences » (11). Aborder l’œuvre fénelonienne dans cette optique, c’est le programme prometteur de l’exposition dont le rang est confirmé par le catalogue qui perpétuera la mémoire de cet événement éphémère. Trois essais évoquent des aspects essentiels de ce rôle de l’archevêque de Cambrai. Abordant « La spiritualité de Fénelon », Benedetta Papsogli demande « hardiment : de quel Dieu nous parle Fénelon » (21). Elle répond que « cette marche de la foi nue » rejoint « des problématiques de notre contemporanéité » (21). Sous le titre « Télémaque, opéra », Laura Naudeix esquisse les grandes répercussions internationales du Télémaque dans ce domaine et fournit en annexe une « liste […] des œuvres tirées du livre VI » (28-29). Bien qu’elle reconnaisse humblement que cette liste n’est pas exhaustive, il faut lui savoir gré de se hasarder pour la première fois à un tel inventaire. Jacques Le Brun avertit que « c’est un peu par le hasard des rencontres sociales » (16) que Fénelon prend la plume pour écrire « des écrits de circonstance » (16) dont le niveau de réflexion, la qualité de l’argumentation et l’originalité de la pensée suscitent la « surprise » (16) et provoquent des débats de longue durée. Même les Aventures de Télémaque destinés primordialement au duc de Bourgogne sont admirés par « des lecteurs aux goûts et aux positions politiques ou religieuses différents, voire contradictoires » (17). Ses versions illustrées, l’édition polyglotte, ses éditions à l’usage scolaire et ses traductions témoignent « de l’accession du livre au statut d’œuvre ‘classique’ » (18). L’exposition saisit ces multiples facettes de l’archevêque de Cambrai en tant qu’elles se reflètent au niveau PFSCL XLIII, 84 (2016) 118 des livres publiés et des images. Le tableau de Louis Hersant consacré au mythe de Fénelon ramenant à un paysan sa vache qui lui avait été enlevée par les ennemis (77) atteste la transformation de l’archevêque en mythe, l’édition des Explications des maximes des saints annotée par Phélipaux, théologal de Bossuet, documente la vivacité des luttes doctrinales. Les dix sections des témoignages exposés sont bien commentées par François-Xavier Cuche et Julien Gueslin. Cette exposition attire l’attention sur une donnée centrale du destin de Fénelon, que les spécialistes ne pouvaient ignorer, mais qu’on n’a jamais illustré d’une telle manière. C’est pourquoi le catalogue devrait devenir un ouvrage de référence pour toutes les recherches futures sur cet auteur. Volker Kapp Gérard Ferreyrolles (dir.) : Traités sur l’histoire (1638-1677). La Mothe Le Vayer, Le Moyne, Saint-Réal, Rapin. Avec la collaboration de Frédéric Charbonneau, Marie-Aude de Langenhagen, Béatrice Guion, Anne Mantero, Christian Meurillon et Helène Michon. Paris : Champion, 2013 (« Sources classiques », 118). 763 p. Gérard Ferreyrolles remarque à juste titre que « le XVII e siècle ne réclame pas d’être examiné dans ses historiographes, mais aussi dans ses ‘historiologues’ » (5), notion par laquelle il désigne les « auteurs des traités sur l’histoire » dont ce volume réunit quatre des plus importants de l’époque. Ces traités débattent surtout trois problématiques : « des questions d’ordre épistémologique - un savoir du passé est-il possible ? - littéraire - comment écrire l’histoire ? - et anthropologique - l’histoire dans ses incessantes révolutions révèle-t-elle une immuable nature humaine ? » (5). Puisque les deux jésuites présents dans cette anthologie se sont signalés par différents traités spécifiques, le commentaire de Marie-Aude de Langenhagen et d’Anne Mantero insiste particulièrement sur le « parallèle entre Histoire et poésie » (257) chez Le Moyne dont De l’Histoire s’apparente à son Traité du Poème héroïque. Selon ce jésuite, « la principale fin de l’Histoire » consiste à ériger les « actions de justice, de courage, de clémence » en « spectacle » pour les « princes, les rois, les empereurs, les ministres d’épée et de robe longue » (310). Cette vision de l’Histoire est contestée par Saint-Réal dont les sept discours formant De l’usage de l’Histoire plaident pour ce qu’on pourrait qualifier de ‘démocratisation’ du genre. Les éditeurs se sentent souvent amenés à avancer des hypothèses sans pouvoir toujours prouver leur pertinence. C’est surtout la situation du père