eJournals Papers on French Seventeenth Century Literature 39/77

Papers on French Seventeenth Century Literature
0343-0758
2941-086X
Narr Verlag Tübingen
2012
3977

L’éducation des enfants du Grand Siècle au prisme de la littérature de jeunesse contemporaine

2012
Dominique Picco
PFSCL XXXIX, 7 7 (2012) L’éducation des enfants du Grand Siècle au prisme de la littérature de jeunesse contemporaine D OMINIQUE P ICCO (U NIVERSITÉ DE B ORDEAUX ) Dans les dernières années du XX e siècle et les premières du suivant, à côté des sept volumes des aventures d’Harry Potter et des multiples titres d’heroic fantasy aux tirages millionnaires, les romans historiques occupent en France une place non négligeable dans le paysage de la littérature de jeunesse contemporaine. Parmi les récits censés se dérouler au XVII e siècle, certains rencontrent un grand succès : nombreux sur les étals des rayons spécialisés des librairies, ils sont souvent absents des rayonnages des bibliothèques publiques. La série des Colombes du Roi-Soleil, d’Anne-Marie Desplat-Duc, dont l’action se situe tout ou partie à Saint-Cyr, maison d’éducation fondée par Louis XIV à l’intention des filles de la noblesse, en est l’exemple le plus frappant. Après Les Comédiennes de monsieur Racine, publié en mai 2005 chez Flammarion, les neuf volumes suivants sont parus au rythme soutenu de deux par an, en grand format 1 , rapidement réunis en coffret 2 , puis en poche 3 , avant de donner naissance en septembre 2011 à une bandedessinée 4 . Le phénomène éditorial Colombes du Roi-Soleil 5 s’accompagne de 1 Le Secret de Louise, octobre 2005 ; Charlotte, la rebelle, février 2006 ; La Promesse d’Hortense, septembre 2006 ; Le Rêve d’Isabeau, mai 2007 ; Éléonore et l’alchimiste, octobre 2007 ; Un corsaire nommé Henriette, mai 2008 ; Gertrude et le nouveau monde, janvier 2009 ; Olympe comédienne, février 2010 ; Adélaïde et le prince noir, janvier 2011 ; Jeanne et les parfums, janvier 2012. 2 En novembre 2007 deux coffrets ont regroupé les six premiers volumes ; l’opération n’a pas été reconduite depuis. 3 Les six premiers volumes sont parus en poche, chez Flammarion, dans la collection « Roman cadet » entre octobre 2009 et mai 2011. 4 Anne-Marie Desplat-Duc, Mayalen Goust, Roger Seiter, Les Comédiennes de monsieur Racine. Les Colombes du Roi-Soleil, Paris, Flammarion, 2011. Dominique Picco 4 la création d’un site internet 6 , de blogs 7 , d’un club offrant de multiples avantages à ses membres 8 . Il ne doit pas pour autant faire oublier la faveur dont jouissent, auprès du jeune public, d’autres ouvrages ayant pour toile de fond le XVII e siècle français, en particulier ceux d’Annie Jay 9 et d’Annie Pietri 10 . Une historienne moderniste, spécialiste de l’éducation des filles, et en particulier de la maison royale de Saint Louis - installée à Saint-Cyr entre 1686 et 1793 - ne peut qu’être interpellée par la fréquence et le contenu de ces romans, d’autant que, dans l’espace de sa vie privée, elle fut aussi prescriptrice de telles lectures à ses propres enfants, filles et garçon. Cette étude naquit donc au croisement de champs de recherches, de lectures familiales mais aussi des représentations de l’époque moderne de jeunes étudiants en histoire, nées de leurs savoirs scolaires et de leurs lectures. Au sein de cette production littéraire, un corpus de vingt-deux romans pour jeunes adolescents publiés entre 1993 et 2011 et ayant pour cadre la France du Grand Siècle, a été constitué et interrogé. Quelle place les auteurs accordent-ils dans leurs romans à l’éducation des enfants, filles et garçons, et de quelle manière l’abordent-ils ? L’éducation dessinée dans ces ouvrages correspond-elle aux réalités historiques dévoilées par les sources normatives et par les témoignages de contemporains ? Y a-t-il, de la part de ces romanciers, recherche de la vérité historique, de la véracité ou simplement de la vraisemblance ? Cherchent-ils à reconstituer le plus fidèlement possible les pratiques éducatives du temps ou bien s’en écartent-ils, volontairement ou non, élaborant par là même un imaginaire de l’éducation des enfants dans la France du Grand Siècle ? Peut-on déterminer si l’option choisie résulte des 5 500 000 exemplaires vendus, toutes éditions confondues au 1 er août 2011. Source : Flammarion. 6 http: / / www.lescolombesduroisoleil.com/ . 7 anne-marie-desplat-duc.over-blog.com/ ; a.desplatduc. free.fr/ . 8 Fonds d’écran. Présentation des héroïnes et de l’intrigue des différents volumes accompagnée de compléments « pédagogiques ». Fiches intitulées L’Univers des colombes. 9 Annie Jay, Complot à Versailles, Paris, Hachette jeunesse, 1993 ; La Vengeance de Marie, Paris, Hachette jeunesse, 1993 ; À la poursuite d’Olympe, Paris, Hachette jeunesse, 1995 ; Au nom du roi, Paris, Hachette jeunesse, 2006 ; La Dame aux élixirs, Paris, Hachette jeunesse, 2010. 10 Annie Pietri, Les Orangers de Versailles, Paris, Bayard Jeunesse, 2000 ; L’Espionne du Roi-Soleil, Paris, Bayard Jeunesse, 2002 ; Le Collier de Rubis, Paris, Bayard Jeunesse, 2003 ; Le Serment de Domenico, Paris, Bayard Jeunesse, 2007 ; Carla aux mains d’or, Paris, Hachette Jeunesse, 2008 ; L’Allée de Lumière, Paris, Bayard Jeunesse, 2008 ; Parfum de meurtre, Paris, Bayard Jeunesse, 2009 ; Pour le cœur du roi, Paris, Bayard Jeunesse, 2010. L’éducation des enfants du Grand Siècle 4 connaissances de l’auteur (ou de ses lacunes) ou bien d’une volonté d’infléchir les réalités historiques en fonction du récit et d’un objectif à atteindre ? Un aspect particulier a également retenu l’attention, celui de la différence d’éducation entre les filles et les garçons en fonction des milieux sociaux. Les auteurs de ces romans y sont sensibles et choisissent d’en retenir quelques éléments mais, là encore, avec quels objectifs ? Nous verrons que cet échantillon permet de réfléchir, à partir de l’éducation des enfants, au rapport de ces auteurs à la vérité historique et à la construction des genres, c’est-à-dire des identités sexuées des personnages. Détermination du corpus Face à la surabondance de romans pour la jeunesse ayant pour cadre chronologique le XVII e siècle français et publiés dans les vingt dernières années, une sélection s’imposait. Afin de déterminer le corpus le plus cohérent possible, plusieurs critères ont été retenus. Le premier XVII e siècle, rare toile de fond de ces romans, a été écarté au profit du seul règne de Louis XIV. Les premières lectures et autres livres considérés comme tels par les éditeurs ont été exclus 11 , tout comme les ouvrages destinés à un lectorat adolescent, dont L’Or blanc de Louis XIV d’Odile Weulersse 12 . Enfin, les ouvrages centrés sur un personnage célèbre, tel Louis XIV 13 ou Molière 14 ont, eux aussi, été éliminés, le caractère exceptionnel du héros pouvant fausser la diversité de l’échantillon. En voulant introduire une dimension genrée à cette étude par la comparaison du traitement de l’éducation des filles et des garçons dans ces différents romans, il a fallu repérer des œuvres où l’épaisseur des personnages n’était pas trop déséquilibrée en faveur de l’un ou l’autre sexe. Par ailleurs, pour ne pas limiter le propos à la vision d’un seul romancier sur l’éducation des enfants au XVII e siècle, le choix a été de ne pas s’appuyer sur la seule série à succès d’Anne-Marie Desplat-Duc, Les Colombes du Roi-Soleil. De plus, 11 En particulier deux livres d’Annie Jay, À la cour du Roi-Soleil, Paris, Milan poche, 2002 et Adélaïde, princesse espiègle, Paris, Éveil et Découvertes, 2010. 12 Odile Weulersse, L’Or blanc de Louis XIV, Paris, Pocket Jeunesse, 2010, est annoncé pour treize ans et plus. 13 Anne-Marie Desplat-Duc, L’Enfance du Soleil, Flammarion, 2007. 14 Pierre Lepère, La Jeunesse de Molière, Paris, Gallimard, 2003 ; Marie-Christine Helgerson, Louison et Monsieur Molière, Paris, Castor Poche, 2003 ; Sylvie Dodeller, Molière, Paris, L’École des Loisirs, 2005 ; Kerbraz, Du petit Poquelin au grand Molière, Paris, Éd. Du Rocher, 2005 ; Michel Laporte, Molière, gentilhomme imaginaire, Paris, Hachette 2007 ; Jean-Côme Noguès, L’Homme qui a séduit le soleil, Paris, Pocket, 2008. Dominique Picco 4 pour ne pas trop déséquilibrer le corpus en faveur de quelques auteurs très attirés par le XVII e siècle comme Annie Jay, Annie Pietri ou Anne-Marie Desplat-Duc, des choix ont été opérés parmi leurs œuvres 15 . Toujours à des fins de comparaison dans le traitement accordé à l’éducation des enfants, des auteurs 16 et des héros masculins 17 ont été inclus dans le corpus. Enfin l’échantillon prend en compte une dernière variable, très personnelle cette fois, celui d’y inclure les lectures de mes enfants 18 , même si cela impliquait de faire remonter les dates de publication jusqu’en 1993 19 . Au final, le corpus rassemble vingt-deux titres dont cinq séries de deux à cinq livres 20 . Les sept auteurs retenus 21 ont un profil très hétérogène. Six femmes pour un seul homme, nés entre 1948 et 1962 22 , exerçant ou ayant exercé - parfois avant de vivre de leur plume - des activités professionnelles très diverses. Comptable, orthophoniste, médecin, consultant, journaliste, ils ont très rarement suivi une formation universitaire en histoire 23 . Leur choix d’écrire des romans historiques pour la jeunesse est justifié par l’éditeur a posteriori - à l’intérieur des livres, sur la quatrième de couverture - ou par l’auteur lui-même sur son propre site 24 , lors d’interviews publiées dans des 15 Ont été écartés la série Marie-Anne fille de roi d’Anne-Marie Desplat-Duc (Premier bal à Versailles, Paris, Flammarion, 2009 ; Un traître à Versailles, Paris, Flammarion, 2010 ; Le secret de la lavandière, Paris, Flammarion, 2010 ; Une mystérieuse reine de Pologne, Paris, Flammarion, 2011) et trois livres d’Annie Pietri, Carla aux mains d’or, op. cit., Le Serment de Domenico, op. cit. et L’Allée de Lumière, op. cit. 16 Arthur Ténor, Guerre secrète à Versailles, Paris, Gallimard, 2003 et, du même, Sabotages en série à Versailles, Paris, Seuil, 2011. 17 Anne-Sophie Silvestre, Course contre le Roi-Soleil, Paris, Castor poche, 2005. De la même auteure, présente au colloque, on a retenu Les Folles Aventures d’Eulalie de Potimaron, Paris, Flammarion, 2010. La participation de Florence Thinard à la table ronde explique l’intégration dans le corpus de Mesdemoiselles de la Vengeance, Paris, Folio junior, 2010. 18 Annie Jay, Complot à Versailles, op. cit., et À la poursuite d’Olympe, op. cit. ; Adeline Yzac, Mondane de Fénelon, Castelnaud, L’Hydre, 2003 ; Anne-Marie Desplat-Duc, Sorcière blanche, Rageot, 2006. 19 Complot à Versailles et À la poursuite d’Olympe ont cependant été réédités en 2007 et 2011. 20 Voir tableau en annexe. 21 Idem. 22 Anne-Marie Desplat-Duc, 1948 ; Adeline Yzac, 1954 ; Annie Pietri, 1956 ; Annie Jay, 1957 ; Arthur Ténor, 1959 ; Anne-Sophie Silvestre, 1960 ; Florence Thinard, 1962. 23 Florence Thinard est la seule à avoir fait une licence d’histoire avant l’IEP de Paris. Source : www.florencethinard.fr/ 24 En plus des sites déjà mentionnés, on peut citer ceux, peu actualisés depuis plusieurs années, d’Annie Pietri, www.anniepietri.com/ et d’Adeline Yzac : L’éducation des enfants du Grand Siècle 4 revues pour la jeunesse, ou encore sur des sites plus ou moins professionnels comme Ricochet 25 . Ils sont motivés, disent-ils, par l’envie de raconter des histoires situées dans le passé, par leur passion pour l’histoire et parfois même par un attrait tout particulier pour le XVII e siècle. Anne-Marie Desplat-Duc est de loin la plus explicite : J’habite à quelques kilomètres du château de Versailles, ce qui explique peut-être ma fascination pour l’histoire. L’exposition Saint-Cyr, Maison royale, organisée en 1999 par les Archives départementales des Yvelines m’a bouleversée. Quelle émotion de voir les cahiers, les livres, les jeux, les rubans des demoiselles de Saint-Cyr ! Je me suis promis d’écrire leur histoire. L’idée est restée quelques années en sommeil, le temps de publier d’autres romans. Et puis en 2003, je me suis lancée dans l’aventure fantastique de l’écriture de ce roman. Et plus j’écrivais, plus j’avais envie d’écrire sur cette époque foisonnante qu’est le règne de Louis XIV. Après Les Comédiennes de monsieur Racine, impossible d’abandonner mes héroïnes, alors j’ai continué ! 26 Ces auteurs remercient rarement les personnes qui ont pu les aider dans leurs recherches 27 et sont encore moins nombreux à donner une liste des sources ou des ouvrages utilisés 28 . Les romans sélectionnés s’adressent à un public relativement homogène, celui d’enfants à partir de dix ans, à l’exception de Course contre le Roi-Soleil d’Anne-Sophie Silvestre 29 , destiné aux neuf ans et plus, qui a néanmoins été retenu dans notre échantillon en raison de son héros masculin. Si ces livres ont une taille variant entre 140 à 350 pages, toute comparaison est impossible compte tenu de la différence de taille des caractères, en particulier entre les ouvrages publiés chez Bayard jeunesse et en Folio junior ou en Livre de poche. Si leur arrière-plan historique couvre théoriquement la http: / / adelineyzac.monsite-orange.fr/ et ceux, très actifs, d’Annie Jay http: / / www.anniejay.com/ et d’Arthur Ténor : http/ / arthurtenor.canalblog.com/ ; http: / / www.bibliotenor.canalblog.com/ ; http: / / pageduroysoleil.canalblog.com/ . 25 www.ricochet-jeunes.org/ sommaire. Signalons également un site consacré aux fictions historiques pour la jeunesse http: / / www.histoiredenlire.com/ . 26 Ce texte figure à la fin des quatre premiers tomes des Colombes du Roi-Soleil pour être remplacé ensuite par la liste des tomes précédents accompagnée, à partir du volume VI, par le résumé de ceux-ci. 27 Le plus souvent figure uniquement un prénom (Annie Jay, Adeline Yzac). Seul Arthur Ténor est plus explicite, voir Sabotages en série à Versailles, op. cit., p. 2. 28 Voir Florence Thinard, op. cit., p. 298 et 299. 29 Op. cit. Dominique Picco 4 période du règne personnel de Louis XIV 30 , les décennies 1670, 1680 et 1690 sont les plus représentées. Le cadre géographique unique de cinq de ces romans est Versailles - le château et la ville, et dix autres contiennent au moins une scène qui s’y déroule. Rares sont donc ceux qui se passent totalement ailleurs, à Paris, en province ou en des lieux multiples, parfois exotiques comme les Caraïbes 31 ou le Siam 32 . Le tropisme versaillais se retrouve dans quatre titres et à côté de l’appellation générale de la série des Colombes du Roi-Soleil, quatre autres contiennent le mot « roi », dont deux « Roi- Soleil ». Le héros de ces romans est bien plus souvent une héroïne puisque en effet seuls trois garçons, pour cinq des vingt-deux romans du corpus, conduisent l’intrigue : Exupère Lecoq, héros de Au nom du roi et de La Vengeance de Marie d’Annie Jay, Philibert Le Brun dans Course contre le Roi- Soleil et Jean de Courçon, le page espiègle de Guerre secrète et Sabotages en série à Versailles. Il existe cependant de nombreux personnages secondaires masculins dont certains occupent une place essentielle dans l’intrigue, en particulier Lambert Frémond dans À la poursuite d’Olympe. L’âge des personnages principaux est parfois donné ou bien calculable : ils ont entre onze et dix-neuf ans et, pour la moitié d’entre eux, quinze ou seize ans, soit quelques années de plus que leurs lecteurs. Socialement, ils sont bien plus souvent nobles que roturiers. En effet, seuls deux héros sont issus du tiers état : Exupère Lecoq, fils d’un officier de police parisien, et Philibert Le Brun, fils imaginaire de Charles Le Brun, premier peintre de Louis XIV 33 . Quelques rares personnages féminins sont de basse extraction telle Mondane, paysanne du Périgord, à moitié sauvageonne 34 , Marion Dutilleul, fille d’un jardinier du château de Versailles 35 , Sylvine, vigoureuse paysanne saintongeaise cherchant à se venger du Commodore 36 , ou encore la chère amie de Pauline de Saint-Meryl, Cécile Drouet, enfant trouvée des rues de Paris mais en réalité de noble naissance 37 . L’écrasante majorité des personnages est donc noble, ce que le lecteur saisit de suite grâce à leurs prénoms vieillots et à leurs noms de famille à rallonge, affublés d’au moins une particule : Louise de Maison Blanche, Charlotte de Lestrange, Hortense 30 Exactement entre 1664 et 1715. La première date est l’année de naissance d’Agathe Françoise Clémence de Préault Aubeterre, héroïne de Sorcière blanche, op. cit., et la seconde celle de l’épilogue de Mondane de Fénelon, op. cit. 31 Environ un tiers de Sorcière blanche, op. cit. 32 Une petite moitié de Charlotte, la rebelle, op. cit. 33 Héros de Course contre le Roi-Soleil, op. cit. 34 Adeline Yzac, Mondane de Fénelon, op. cit. 35 Personnage principal des Orangers de Versailles et des volumes suivants, op. cit. 36 Florence Thinard, Mesdemoiselles de la Vengeance, op. cit. 37 Voir Annie Jay, Complot à Versailles et La Dame aux élixirs, op. cit. L’éducation des enfants du Grand Siècle 4 9 de Kermenet, Isabeau de Marsanne (les quatre premières colombes), Olympe de Clos Renault, Pauline de Saint-Meryl, Alix de Maisondieu, Eulalie de Potimaron, Olympe d’Avermont, etc. L’éducation, marqueur social au XVII e siècle Les héros de ces différentes aventures étant des enfants ou presque des adolescents, il pouvait paraître d’emblée évident que leur éducation retienne l’attention des romanciers. Or, l’intérêt qu’ils portent à cet aspect - pourtant indissociable de l’âge de leurs héros ou héroïnes - est extrêmement variable, allant de l’allusion à l’objet central de l’intrigue. Cependant, malgré des différences en termes de quantité et qualité, tous ces auteurs transmettent à leurs lecteurs l’idée que l’éducation était au XVII e siècle un marqueur social essentiel. S’il est toujours plus ou moins question d’éducation dans les romans de ce corpus, trois catégories peuvent néanmoins être distinguées parmi eux. Les ouvrages appartenant à un premier groupe montrent peu d’intérêt pour l’éducation reçue par les personnages - avant le début de l’intrigue ou pendant son déroulement - ce qui se manifeste par de rares et brèves allusions. Ainsi, dans la série d’Annie Pietri, qui débute par Les Orangers de Versailles, à peine quelques phrases signalent-elles la maîtrise de la lecture et de l’écriture par Marion Dutilleul et la nécessité d’une transmission intergénérationnelle des savoir-faire horticoles. Dans L’Espionne du Roi-Soleil et sa suite - du même auteur - les héros sont de noble extraction, leur oncle et tuteur est chargé de leur éducation, mais du contenu de celle-ci le roman ne dit mot ou presque. Dans la seconde catégorie, la place de l’éducation est importante, le romancier y faisant souvent référence, ce qui n’est pas synonyme pour autant de descriptions détaillées. Les remarques, souvent brèves, sont fréquentes, voire récurrentes, en particulier dans la présen-tation des personnages ou dans la perception qu’ils ont les uns des autres. Les romans d’Annie Jay, d’Anne-Sophie Silvestre, de Florence Thinard et Sorcière blanche, d’Anne-Marie Desplat-Duc, entrent dans ce cas de figure. Enfin, la place de l’éducation est centrale dans un dernier groupe d’ouvrages. Au sein du premier tome des Colombes du Roi-Soleil, elle forme le cadre spatial du roman puisqu’il se déroule dans un établissement scolaire, dont l’auteure met en avant quelques contenus éducatifs et peu de méthodes pédagogiques. Dans les volumes suivants, l’éducation reçue à Saint-Cyr constitue à la fois le lien entre les héroïnes et une composante récurrente de leur identité. Enfin, même si l’action de Mondane de Fénelon n’est pas située dans un établissement scolaire, l’éducation des filles en est le thème central, au point qu’on peut y voir un roman d’éducation. Pour clore cette typologie, reste à Dominique Picco 49 signaler combien Arthur Ténor privilégie l’invention romanesque dans sa présentation de l’éducation reçue par un page à la grande écurie de Versailles. Dans la France du XVII e siècle, le peuple se caractérisait, entre autres choses, par son absence d’instruction, ce que ces romanciers mettent en exergue en insistant sur le caractère exceptionnel de la maîtrise de la lecture et de l’écriture chez un enfant issu de milieux modestes. Dans Les Orangers de Versailles, lors d’une de ses premières rencontres avec Marion Dutilleul, M me de Montespan s’exclame : « Tu sais lire ! Qui t’a appris ? », et elle de répondre : « Je sais écrire aussi. » 38 Mondane, qui vit seule avec son chien dans les bois entourant le château de la famille Fénelon, en Périgord, est « moins que pauvre. […] sans maison ni famille ni personne » 39 . Elle ne sait ni lire, ni écrire, mais Adeline Yzac la rend consciente des clivages sociaux en matière d’accès à l’instruction : « sur la paroisse, le curé donnait quelques leçons aux fils de laboureurs, des négociants en batellerie. Les fils Magnac de la Forge, qui fabriquaient des cylindres de moulins à sucre, avaient, eux, un précepteur comme les enfants du château. » 40 La plupart des personnages secondaires féminins ne savent pas lire, telle Prunelle dans les romans d’Arthur Ténor ou les lavandières parisiennes d’À la poursuite d’Olympe. Mais les enjeux de cette ignorance ne sont pas toujours les mêmes. Ainsi Prunelle est-elle gênée dans sa relation amoureuse avec Jean de Courçon car elle ne peut lui écrire : « ‘Un billet… mais je ne sais pas écrire’. Jean ferme les yeux. Il s’en veut de ne pas avoir songé qu’une jardinière, si jolie et si délurée soit-elle, ne sait pas écrire. » 41 Quant à Annie Jay, elle pose la question de la nécessité de l’éducation pour les petites gens à travers une discussion entre des lavandières : Je veux que mes deux petits frères sachent lire et écrire. Le curé de Saint- Paul nous demande quatre livres pour leur apprendre à lire et six livres pour écrire. - Lire et écrire cela ne sert à rien, fit doctement Rose. Dans la vie si tu sais compter, tu peux toujours t’en sortir. Pourquoi leur fatiguer la cervelle avec ces idioties ? - C’est ce que je lui ai dit, renchérit bien haut Margot. Dans la famille, personne ne sait lire, et nous vivons honnêtement. 38 Annie Pietri, Les Orangers de Versailles, op. cit., p. 34. 39 Adeline Yzac, Mondane de Fénelon, op. cit., p. 23. 40 Ibid., p. 69. 41 Arthur Ténor, Guerre secrète à Versailles, op. cit., p. 102. L’éducation des enfants du Grand Siècle 49 Autour d’elles, on approuva bruyamment. Pourtant Marianne souffla d’une petite voix : Moi, j’aimerais bien savoir lire. Chaque fois que Nicolas me dit, « j’ai écrit ceci ou j’ai lu cela », je me dis qu’il doit me trouver bien bête. - Moi aussi, j’aimerais bien, fit à son tour Céleste. Mais sans argent... 42 Ce débat autour de l’intérêt de savoir lire et écrire se retrouve dans un autre roman d’Annie Jay, La Dame aux élixirs, où Céline Drouet veut instruire son valet Rémi pourtant bien rétif : « Lire et écrire, ça sert à rien ! Tudieu, il me reste encore un bras pour travailler honnêtement […] Attends-moi, pesta Cécile. Préfères-tu être valet d’écurie toute ta vie ? À graisser des harnais et à panser des chevaux ? Avec de l’instruction, tu pourrais devenir secrétaire et ne point te fatiguer […] » 43 . Si les rudiments d’instruction sont donnés ici par une jeune fille à son protégé, dans ce corpus de romans, ils peuvent l’être aussi par un curé ou, plus souvent encore, par la famille. Ainsi Marion Dutilleul explique-t-elle à M me de Montespan : « C’est ma mère qui m’a enseigné tout ce que je sais. » 44 Dans Parfum de meurtre, la Voisin sermonne sa fille : « J’espérais beaucoup de toi, mais tu ne seras qu’une piètre sorcière. Voilà pourquoi je ne souhaite pas que l’on sache que tu es ma progéniture » 45 . En matière de savoirs professionnels, le père est plus souvent évoqué que la mère, tel celui de Marion Dutilleul, jardinier à l’origine de sa vocation de parfumeuse. Rares sont les auteurs qui font allusion à la classe faite par le curé, en ville ou à la campagne, et aucun ne mentionne l’existence d’un important réseau d’écoles de charité lié à la réforme catholique. Au sein des élites sociales, certains auteurs signalent avec pertinence la différence d’éducation entre enfants de bourgeois et de nobles. Ainsi, Philibert Le Brun, onze ans, héros de Course contre le Roi-Soleil, connaît son destin : « Il allait de soi que j’allais apprendre le métier de peintre. Le fils du Premier peintre du roi ne pouvait devenir autre chose que peintre. » 46 Au cours de l’intrigue, il craint la réaction du roi : « Si le roi, d’un geste de la main, écrasait l’insolent moucheron qui s’était permis de troubler l’étiquette si parfaitement réglée de sa cour, tous s’empresseraient de crier haro, de fustiger la lamentable éducation de la jeunesse chez les bourgeois […]. » 47 Alors que Philibert hésite à commencer son apprentissage de peintre, un comte lui propose de devenir officier, et l’enfant de répondre : « Je remercie 42 Annie Jay, À la poursuite d’Olympe, op. cit., p. 131-132. 43 Annie Jay, La Dame aux élixirs, op. cit., p. 116. 44 Annie Pietri, Les Orangers de Versailles, op. cit., p. 34. 45 Annie Pietri, Parfum de meurtre, op. cit., p. 43. 46 Anne-Sophie Silvestre, Course contre le Roi-Soleil, op. cit., p. 6-7. 47 Ibid., p. 126. Dominique Picco 49 beaucoup monsieur le comte, mais mon père m’a élevé pour être peintre. Devenir peintre est ce que je souhaite le plus au monde. » 48 Le caractère insupportable de toute transgression de l’ordre inhérent à la société d’Ancien Régime, parfaitement intériorisé par les individus d’alors, se retrouve dans bien des situations romanesques, en particulier lorsqu’une famille noble sombre dans l'indigence. Ainsi, la tante d’Agathe de Préault, héroïne de Sorcière blanche, se lamente-t-elle auprès de sa sœur : « Ma pauvre amie, une prison n’est pas un lieu propice pour la bonne éducation des enfants ! » 49 La tante propose alors d’emmener Agathe et son frère chez elle où « ils bénéficieraient d’une nourriture saine et d’une éducation convenable » 50 . Après bien des hésitations, leur mère consent à les laisser partir : « Oh ! j’aurais tellement voulu que vous receviez une bonne éducation et que vous puissiez tenir votre rang » 51 . Après un bain, un bouillon, du sommeil, de nouveaux habits, la vie au grand air 52 , le retour de ces enfants à une vie conforme à leur rang est couronné par la prise en main de leur éducation : « Notre tante voulait que nous soyons instruits avec ses enfants. Tous les matins, l’abbé Brentano franchissait à pied le portail […]. » 53 Cette distinction entre les individus du fait de leur éducation joue un rôle central dans l’intrigue de Complot à Versailles. Par son entremise, l’auteur suggère rapidement au lecteur l’origine sociale de Cécile, jeune fille amnésique recueillie par les héros : « Comme elle suivait les leçons que l’abbé donnait à Pauline, on s’aperçut vite qu’elle lisait et écrivait tant le français que le latin. Elle parlait couramment l’espagnol et avait, en outre, de bonnes notions d’algèbre et de géométrie. Il semblait évident que sa famille n’avait pas négligé son éducation. » 54 Cécile a tout oublié de son enfance, mais elle recouvre petit à petit la mémoire en retrouvant fortuitement ses premiers apprentissages. Ainsi, au cours d’une leçon de clavecin de Pauline, elle repère les fausses notes de son amie avant « d’approcher de l’instrument. Elle regarda la partition où les notes semblaient danser, et comme hypnotisée, posa les mains sur le clavier. La mélodie s’éleva mécanique et sans âme mais juste. La dernière note achevée, 48 Ibid., p. 160. 49 Anne-Marie Desplat-Duc, Sorcière blanche, op. cit., p. 12. Remarquons ici les similitudes avec l’enfance de M me de Maintenon. 50 Idem. 51 Ibid., p. 15. 52 Ibid., p. 23-24. 53 Ibid., p. 36. 54 Annie Jay, Complot à Versailles, op. cit., p. 33. L’éducation des enfants du Grand Siècle 49 Cécile se leva comme une automate […]. » 55 Une seconde étape est franchie au moment de monter à cheval avec Guillaume, le frère de Pauline : « Tu sais monter au moins ? » […] Elle siffla dans ses dents, puis regarda l’étrier comme pour en comprendre le mode d’emploi. « Nous allons bientôt le savoir » finit-elle par avouer. « Comme pour le clavecin ? » Elle ne prit pas la peine de répondre, mit son pied sur l’étrier en s’agrippant au pommeau de la selle et se propulsa à califourchon, gênée par ses jupes. « Je sais » dit-elle sans plus d’explication en partant au pas jusqu’à l’entrée. 56 Ici, le message de l’auteur est clair et s’éloigne du seul XVII e siècle, pour tendre vers l’intemporalité : l’éducation et ses apprentissages sont ce qui reste quand on a tout oublié. L’éducation, un marqueur de genre Sauf exception, dans ces romans, la différence d’éducation entre les deux sexes est très sensible et participe de la construction d’une identité genrée des personnages. Ainsi, dans Complot à Versailles, la tante des enfants a « pris en charge l’éducation de ses neveux : maîtres de musique et de danse pour Pauline, leçons d’escrime et d’équitation pour Guillaume. » 57 Atypique, le père d’Eulalie de Potimaron l’est tout à fait lorsqu’il explique à sa fille, juste avant son départ pour Versailles où elle va parfaire son éducation afin de devenir une « demoiselle accomplie » 58 : « vous savez que je n’aime guère les règles et les principes. Je vous ai élevée jusqu’à ce jour sans me demander si ce que je vous apprenais convenait plutôt à un garçon ou plutôt à une fille » 59 . Plusieurs structures éducatives réservées aux garçons des élites sociales sont évoquées dans ces romans comme les académies, les collèges et l’école des pages décrite en ces termes par Arthur Ténor : Comme chaque élève de l’école des pages de Versailles, cet adolescent de quinze ans au caractère bien trempé recevait les enseignements d’élégante écriture, de pieux latin, et d’utiles mathématiques, des leçons de bonnes manières, des cours de danse, mais aussi des entraînements de première qualité en équitation et escrime. 60 55 Ibid., p. 41. 56 Ibid., p. 224. 57 Ibid., p. 23-24. 58 Anne-Sophie Silvestre, Les folles Aventures d’Eulalie de Potimaron, op. cit., p. 6. 59 Ibid., p. 9. 60 Arthur Ténor, Sabotages en série à Versailles, op. cit., p. 5-6. Dominique Picco Si les frasques des pages sont bien rendues par l’auteur, son appréciation quelque peu fantaisiste des contenus éducatifs se confirme quand son héros, à la recherche d’un « curé » pour se faire traduire son thème latin, a « la divine surprise de tomber sur le confesseur du roi en personne, le père Lachaise. Celui-ci se [fait] un plaisir de rendre service à un garçon si aimable, d’autant que le texte [est] un extrait du Manuel du parfait courtisan. » 61 Dans L’Espionne du Roi-Soleil, Louis Étienne de Maisondieu reçoit une « noble éducation » 62 , mais l’auteur n’en retient que la fréquentation régulière d’une académie d’escrime, citée à cinq reprises au cours du roman, et la lecture de livres de géographie 63 . Le père d’Exupère Lecoq a dû « emprunter une grosse somme pour payer les études de son fils » 64 , en effet il « lui a fait faire des études au collège et il a d’excellentes manières. » 65 Exupère lui exprime sa reconnaissance au moment de recevoir une récompense du roi pour services rendus. « Je souhaite partager cette somme avec mon père », dit-il. « Sans l’éducation qu’il m’a fait donner, je ne serais pas avec vous aujourd’hui. » 66 Néanmoins, du contenu de ladite éducation, Annie Jay ne dit mot. Du séjour au collège de Guillaume de Saint-Meryl, frère de Pauline (personnage principal de Complot à Versailles), elle mentionne uniquement le coût des études au collège : Quatre années d’internat chez les jésuites de Chartres l’attendaient, entrecoupées de rares vacances pendant lesquelles il ne pensait pas revoir les siens faute d’argent. En effet, Guillaume, conscient de la charge financière qu’il représentait pour sa tante avait décidé de ne pas lui imposer le coût supplémentaire des voyages. De nombreux adolescents, comme lui sans fortune, payaient une partie de leur scolarité en travaillant pour les collèges. Les plus jeunes aidaient aux cuisines ou aux écuries, les plus âgés en servant de répétiteur ou de surveillant. Il espérait ainsi se faire un petit pécule qui lui permettrait, qui sait ? de poursuivre ses études au-delà du collège. 67 Quant à Lambert Frémont, fils d’un négociant fraîchement anobli et l’un des héros d’À la poursuite d’Olympe : « À sa sortie du collège, voilà deux ans, il avait décidé de voyager en Europe. C’est ainsi que grâce aux relations de son père, il avait vu les splendeurs antiques de Rome. Il avait ensuite séjour- 61 Ibid., p. 118-119. 62 Annie Pietri, L’Espionne du Roi-Soleil, op. cit., p. 11. 63 Ibid., p. 37. 64 Annie Jay, Au nom du roi, op. cit., p. 61-62. 65 Ibid., p. 20. 66 Ibid., p. 216. 67 Annie Jay, Complot à Versailles, op. cit., p. 32. L’éducation des enfants du Grand Siècle né à la cour de Savoie à Milan. Et il avait visité Venise, Prague et Varsovie. » 68 L’auteure interprète à sa façon la formation des fils de négociants qui, dès le XVI e siècle, comportait un séjour en relation avec l’affaire familiale dans différentes places commerciales, en y mêlant le « grand tour » des jeunes aristocrates européens. Si un personnage masculin bénéficie d’une éducation domestique, l’auteure insiste alors sur la transmission du métier ou bien sur la différence de comportement du garçon vis-à-vis des maîtres et des apprentissages par rapport à sa sœur. Ainsi dans Sorcière blanche, tandis qu’Agathe a « soif de tout connaître » 69 , son frère, « peu porté sur les études, [détestait le précepteur] et s’efforçait d’écourter les leçons » 70 en inventant sans cesse de nouvelles bêtises sanctionnées par de multiples punitions. Finalement, dans cette vingtaine de romans, l’historien est frappé par la quasi-absence de précisions quant au déroulement et au contenu de l’éducation reçue par ces garçons et ne peut que s’interroger sur ces silences. Ils peuvent être liés, soit au manque de connaissance des auteurs, soit à leur absence d’intérêt pour une éducation masculine allant de soi, contrairement à celle des filles, ou bien encore à l’indifférence supposée d’un lectorat très largement féminin. Pour les filles, la présentation est très différente selon les milieux sociaux. Ainsi, Adeline Yzac prête-t-elle à Mondane cette remarque à propos des petites campagnardes : « Mais des filles qui apprenaient, aucune. À part les demoiselles de Fénelon, bien sûr » 71 . Une telle affirmation est à nuancer au regard de la fréquentation féminine, attestée par les sources, des leçons de catéchisme accompagnées de rudiments de lecture données par les curés des villages de France au XVII e siècle. Dans les bonnes familles, la finalité de l’éducation des filles est brossée en ces termes par Annie Jay : Une jeune fille devait connaître les saintes écritures, la broderie et les bonnes manières. Cela suffisait pour devenir une bonne épouse et une bonne mère. Car une femme qui lit et qui réfléchit, c’est bien connu, c’est la porte ouverte à tous les ennuis… On lui avait même expliqué qu’en société elle devait écrire en faisant des fautes afin de ne pas paraître pédante, qu’elle devrait rire d’un air niais si on parlait philosophie, ou rougir dès qu’un homme lui adresserait la parole. 72 Si le début de la phrase offre bien des similitudes avec des textes d’époque, en particulier avec les écrits pédagogiques de M me de Maintenon, la chute 68 Annie Jay, À la poursuite d’Olympe, op. cit., p. 72. 69 Anne-Marie Desplat-Duc, Sorcière blanche, op. cit., p. 37. 70 Ibid., p. 36. 71 Adeline Yzac, Mondane de Fénelon, op. cit., p. 69. 72 Annie Jay, À la poursuite d’Olympe, op. cit., p. 19. Dominique Picco relève plus de l’imagination de la romancière. Pour les filles nobles mais pauvres, comme Agathe de Préault, l’éducation est vue comme indispensable à leur avenir. « Sachez ma fille » lui dit sa tante « que votre seule dot est votre joli minois et votre éducation. Sans un sou, le couvent ne vous accueillera pas, la seule solution qui s’offre à vous est d’accepter un mari riche que votre beauté saura séduire. » 73 Lire et écrire étant rare parmi les filles des milieux populaires, la maîtrise de ces savoir-faire offre à ces auteurs un élément constitutif du caractère exceptionnel de l’héroïne. Dans Les Orangers de Versailles, un médecin de la cour s’étonne que Marion sache lire : « Tu voudrais me faire croire que tu sais lire ! Et d’abord comment t’appelles-tu ? […] savoir lire est une chose rare et précieuse pour une fille de ta condition. Tu n’es donc pas idiote […] » 74 Ce caractère la distingue aussi auprès du roi : « Ainsi, vous savez aussi lire et écrire. Vous êtes décidément une bien étonnante petite personne ! » 75 Dans tous ces romans, le cadre privilégié de l’éducation des filles est la maison familiale, ce qui correspond bien à la situation du temps. Dans les milieux modestes, « voir faire et ouïr dire » sa mère permet l’acquisition des gestes et des savoirs de la ménagère, auxquels s’ajoutent parfois ici d’autres connaissances, dont celle des plantes et des remèdes, voire des pratiques magiques 76 . Dans les maisons nobles, les fillettes bénéficient, à l’instar d’Alix et Clémence de Maisondieu 77 , de leçons de maîtres de musique ou de danse. En dehors des abbés Godart 78 et Brentano 79 , le lecteur ne connaît ni le nom de leurs enseignants, ni le contenu de leurs enseignements, ni leur conception de l’éducation des filles. La description du « vieux professeur ronchon » 80 d’Olympe de Clos-Renault n’en est que plus exceptionnelle, lui qui a « longtemps renâclé à enseigner à une fille » et qui pense que les filles ont une « cervelle trop molle pour apprendre comme les garçons l’algèbre et la géométrie, le latin ou le grec. Il fallait s’en tenir à la lecture et à l’écriture, car on avait déjà vu des filles qui, ayant trop d’instruction, s’étaient retrouvées avec une tête difforme. » 81 Dans le cadre familial, certaines apprennent à monter à cheval, telle Alix de Maisondieu que son frère 73 Anne-Marie Desplat-Duc, Sorcière blanche, op. cit., p. 196. 74 Annie Pietri, Les Orangers de Versailles, op. cit., p. 133. 75 Ibid., p. 168. 76 Voir les romans d’Annie Pietri. 77 Annie Pietri, Le Collier de Rubis, op. cit., p. 166. 78 Annie Jay, Complot à Versailles, op. cit., p. 22-23 et p. 33. 79 Anne-Marie Desplat-Duc, Sorcière blanche, op. cit., p. 36 et p. 57. 80 Annie Jay, À la poursuite d’Olympe, op. cit., p. 20. 81 Idem. L’éducation des enfants du Grand Siècle considère comme « une excellente cavalière » 82 tout en réprouvant qu’elle monte en habit d’homme : « Les robes d’écuyères sont tout de même plus convenables pour une jeune fille de votre âge et de votre rang » lui dit-il 83 . La maîtrise de l’équitation s’accompagne souvent de celle de l’escrime, comme chez Eulalie de Potimaron qui, après son arrivée à Versailles, s’entraîne dans les greniers du château. La pratique d’activités propres à l’identité masculine de l’époque justifie là encore la singularité de l’héroïne. Lors d’une entrevue avec Alix de Maisondieu, Louis XIV lui tient ses propos : « Je vous sais capable de monter à cheval et de vous battre à l’épée comme les meilleurs escrimeurs. J’ai reconnu en vous la force de caractère et la détermination de votre père. » 84 Les activités considérées comme masculines suscitent pourtant la méfiance des éducatrices ; Eulalie de Potimaron se voit ainsi réprimandée en ces termes : « Êtes-vous sotte à ce point ? Ne comprenez-vous pas que, perchée sur un arbre, tous les passants - mêmes les gardes et les valets ! - pouvaient voir vos jambes et l’envers de vos jupons ? » 85 Elle qui aime par-dessus tout tirer l’épée a saisi qu’en certaines circonstances il fallait adopter l’habit d’homme : « Si on nous aperçoit, on croira voir deux pages indisciplinés, ce qui est banal, et même toléré. Si l’on voit deux filles, il y aura drame, scandale, enquête. » 86 Même si les historiens connaissent nombre de femmes qui, au XVII e siècle, maniaient l’épée, montaient à cheval, s’habillaient en homme et transgressaient les normes de genre, il semble plutôt que les romanciers qui dotent leurs personnages de telles passions, cherchent à dessiner une héroïne éloignée de la vulgate de la femme du Grand Siècle et qui puisse séduire les lectrices d’aujourd’hui, plutôt que refléter l’existence de tels comportements à cette époque-là. L’éducation conventuelle qui, dans la France du XVII e siècle, ne concernait qu’un faible nombre de petites filles, est dépeinte ici d’une manière très négative. Olympe de Clos-Renault, qui a séjourné depuis la mort de sa mère chez les Visitandines de la rue Saint-Antoine à Paris ne cesse au fil des pages de répéter son horreur d’un couvent dont elle a réussi à s’échapper. Lieu d’enfermement, il l’est pour la plupart des héroïnes, telle Henriette, une des Colombes du Roi-Soleil : « Ma parole, vous êtes devenue folle ! S’enfermer dans un couvent alors que la vie du dehors est si palpitante, c’est bien la dernière chose à conseiller. » 87 Au-delà de telles appré- 82 Annie Pietri, L’Espionne du Roi-Soleil, op. cit., p. 45. 83 Ibid, p. 33-34. 84 Ibid, p. 182-183. 85 Anne-Sophie Silvestre, Les Folles Aventures d’Eulalie de Potimaron, op. cit., p. 65. 86 Ibid., p. 97. 87 Anne-Marie Desplat-Duc, Le Rêve d’Isabeau, op. cit., p. 53. Dominique Picco ciations, les contenus de l’éducation en milieu conventuel sont rarement détaillés. L’apothicaire que rencontre la sorcière blanche, Agathe de Préault, n’y voit qu’enseignement de « la piété, la charité, la broderie et le chant » 88 . Quant à Olympe, baronne d’Haussy, l’une des héroïnes de Mesdemoiselles de la Vengeance, elle narre sa propre expérience en ces termes : « À neuf ans, je fus confiée à l’Abbaye aux Dames avec d’autres filles aussi nobles que démunies. Les nonnes nous enseignèrent l’obéissance, la prière, et la broderie. » 89 Au couvent, les livres pieux étant les seuls autorisés, Annie Jay imagine une circulation clandestine d’ouvrages interdits. Ainsi, une jeune religieuse annonce à Olympe qu’elle lui a « trouvé la République de Platon, […] ouvrage païen » 90 , et qu’une dame qui loue une cellule va lui « prêter des poèmes de Ronsard » 91 . Même si une telle circulation n’était pas impossible au XVII e siècle dans un couvent huppé comme celui-ci, la plupart des héroïnes de ces romans ne découvrent néanmoins les livres interdits qu’à leur sortie. Isabeau de Marsanne, l’une des Colombes du Roi-Soleil lit Le Grand Cyrus à la princesse de Condé 92 ; une autre découvre Clélie dans la chambre de Madame de Caylus 93 . Olympe d’Haussy, fouillant dans le butin amassé par le pirate Commodore y puise « L’Histoire naturelle de Pline, le Discours de la méthode de Descartes, une Théorie de l’art de l’épée ou du fleuret, le Message céleste où Galilée prétend que la terre tourne autour du soleil » 94 et cherche à initier son ravisseur un peu trop empressé à la carte du tendre 95 . Présentée de la sorte, l’éducation conventuelle risque fort d’être perçue de façon négative par les lectrices d’aujourd’hui, d’autant que s’y ajoutent nombre de remarques sur la discipline, la clôture, la séparation d’avec les parents. Seule la présentation de Saint-Cyr proposée par Anne-Marie Desplat-Duc est plus nuancée. Dans les Colombes du Roi-Soleil, elle souligne en effet que cette institution peut convenir à certaines fillettes et pas à d’autres. Elle donne quelques précisions sur les contenus éducatifs, insistant sur la place du théâtre, montrant l’enseignement de l’histoire et de la géographie et signalant les méthodes pédagogiques utilisées 96 . De ce fait, le corpus prend 88 Anne-Marie Desplat-Duc, Sorcière blanche, op. cit., p. 164. 89 Florence Thinard, Mesdemoiselles de la Vengeance, op. cit., p. 186-187. 90 Annie Jay, À la poursuite d’Olympe, op. cit., p. 18. 91 Ibid., p. 2. 92 Anne-Marie Desplat-Duc, Le Rêve d’Isabeau, op. cit., p. 275. 93 Anne-Marie Desplat-Duc, Charlotte, la rebelle, op. cit., p. 110. 94 Florence Thinard, Mesdemoiselles de la Vengeance, op. cit., p. 134. 95 Ibid., p. 199-200. 96 De nombreuses scènes se situent dans les classes et font allusion à l’organisation du travail en bande, c’est-à-dire en groupe. L’éducation des enfants du Grand Siècle en compte la différence qui existait, à la fin du XVII e siècle, entre l’éducation délivrée dans les couvents ordinaires et celle de Saint-Cyr, et cela même après sa transformation en communauté régulière dont l’auteure fait d’ailleurs état dans le volume cinq 97 . La romancière montre combien l’éducation reçue valorise ces jeunes femmes qui, même issues d’une noblesse désargentée, peuvent ainsi prétendre à des fonctions de demoiselles d’honneur à la cour ou de gouvernantes dans de puissantes familles. Elle met en exergue le goût pour l’instruction des enfants qui leur a été transmis par l’institution, en particulier dans Le Rêve d’Isabeau mais également dans d’autres épisodes. De son voyage de retour de Siam, Charlotte de Lestrange raconte : Je passais beaucoup de temps à instruire les jeunes esclaves. Je m’attachais beaucoup à Pan […]. En trois mois, il parlait un français correct et je lui enseignai ce que j’avais moi-même appris à Saint-Cyr : le calcul, l’histoire, la géographie. Il me semblait que si on lui en donnait l’occasion, il pourrait s’élever au-dessus de sa condition, d’autant qu’il était plutôt bien fait de sa personne, qu’il avait les traits fins, de grands yeux et un sourire charmeur. 98 La fin de ce passage laisse percer des préoccupations plus proches des Lumières que de la fin du XVII e siècle, en particulier sur la possibilité de sortir de sa condition par l’instruction, encore que, pour les esclaves, la réflexion reste très marginale. Au terme de cette étude, l’historien se doit de souligner combien l’utilisation de l’éducation comme marqueur d’identité sociale et de genre par les auteurs de la vingtaine d’ouvrages retenus correspond aux réalités de la société française du XVII e siècle. À l’opposé, la place centrale de la religion dans l’éducation des enfants est, en très grande partie, occultée par ces romanciers. Au détour d’une phrase, Eulalie de Potimaron affirme avec dépit que, « oui, à Versailles, il était plus qu’obligatoire d’aller à la messe tous les jours » 99 . Négative, sœur Marie-Victoire l’est aussi sur le couvent : « Tu sais, Olympe, ce qui m’ennuie au couvent, c’est qu’on n’y parle que de religion. » 100 Prendre le voile n’est d’ailleurs jamais envisagé comme le résultat d’une vocation mais comme le signe d’un sacrifice à d’autres exigences, comme pour Clémence de Maisondieu dans L’Espionne du Roi- Soleil 101 . Mondane, cherchant l’origine du plaisir que lui donne la lecture, est 97 Anne-Marie Desplat-Duc, Le Rêve d’Isabeau, op. cit., chapitres 7 à 10. 98 Anne-Marie Desplat-Duc, Charlotte, la rebelle, op. cit., p. 249. 99 Anne-Sophie Silvestre, Les folles Aventures d’Eulalie de Potimaron, op. cit., p. 35. 100 Annie Jay, À la poursuite d’Olympe, op. cit., p. 21. 101 Annie Pietri, L’Espionne du Roi-Soleil, op. cit., chapitres 3 et 7. 50 la seule héroïne en proie à des angoisses religieuses : « Au fond le Bon Dieu et Jésus n’avaient rien à voir avec ce qui lui arrivait. Le jour où elle avait découvert ces jolies lectures qui fleurissent et embaument comme des roses, elle aurait dû s’enfuir à toutes jambes, voilà tout. C’est le diable qui l’avait eue et il la tenait bon. » 102 On sent bien ici combien certains auteurs ont du mal à se départir des critiques des Lumières pour envisager le siècle précédent, celui de la réforme catholique, et pour s’immerger dans une époque antérieure à la déchristianisation. Peut-être faut-il voir là aussi une volonté de ne pas ennuyer le lectorat avec des préoccupations religieuses éloignées de son quotidien. Il est sinon impossible d’interpréter la remarque de Charlotte de Lestrange, profond contresens sur le XVII e siècle : « Moi-même je ne me sentais pas franchement catholique. À dire vrai, je ne me sentais pas non plus totalement huguenote. Il me semblait que la religion était une source d’ennui et qu’il était préférable de ne pas exposer ses opinions. » 103 Finalement qu’apprenaient-ils, ces enfants, filles et garçons au Grand Siècle ? Peu de choses selon la plupart des auteurs, dont Annie Jay, pour qui la vraie école est celle de la vie. Ainsi, à Olympe, elle prête cette remarque : « Depuis trois semaines qu’elle était avec les lavandières, elle avait plus appris sur la vie qu’avec les religieuses en trois ans. » 104 Il en est de même pour les garçons, dont Silvère, personnage de Complot à Versailles, au cours d’un duel. Il se rend compte qu’« il y avait un monde entre la théorie de l’académie et la pratique […], même s’il avait eu les meilleurs maîtres d’armes de la place de Paris » 105 . Si les institutions scolaires paraissent souvent sans intérêt à ces romanciers, les maîtres et les leçons qu’ils dispensent le sont aussi. Seuls les parents sont un peu mieux traités, en particulier la mère d’Olympe de Clos-Renault qui fréquentait des précieuses dont la tête remplie n’avait rien de difforme, et pouvait se vanter de savoir plus de latin que bien des hommes. Elle avait donc fait apprendre à sa fille le latin et le grec […] À treize ans, lorsque sa mère était morte, Olympe lisait couramment Virgile, Cicéron et Homère. 106 En matière de transmission éducative, ces romanciers ont du mal à se départir de l’opinion de Rousseau sur les vertus de l’éducation familiale mais aussi du point de vue des Lumières et du siècle suivant sur les structures éducatives ayant précédé les lois scolaires du XIX e siècle. 102 Adeline Yzac, Mondane de Fénelon, op. cit., p. 61. 103 Anne-Marie Desplat-Duc, Charlotte, la rebelle, op. cit., p. 79. 104 Annie Jay, À la poursuite d’Olympe, op. cit., p. 104. 105 Annie Jay, Complot à Versailles, op. cit., p. 297. 106 Annie Jay, À la poursuite d’Olympe, op. cit., p. 20. Dominique Picco L’éducation des enfants du Grand Siècle 50 Sous couvert d’une toile de fond historique, celle de la société française du XVII e siècle, ces romans véhiculent ainsi l’image traditionnelle de la répartition des rôles entre hommes et femmes, mais aussi de l’exclusion des femmes de certaines études et de certaines professions. Or, s’il est exact qu’au XVII e siècle, une femme de condition n’avait pas le droit d’exercer une profession, que les filles n’avaient pas accès aux études secondaires et supérieures, la généralisation fait sens. Agathe, qui cherche à se faire embaucher par un apothicaire de La Rochelle, se voit répondre : « Vous n’êtes pas à votre place dans cette officine. Les femmes n’ont pas un cerveau bâti pour les sciences et la médecine. Vos parents vous ont fort mal éduquée. » 107 La remarque du père de Marion Dutilleul est du même registre : L’an passé, j’ai voulu la placer comme apprentie chez un parfumeur. Mais ils ne veulent que des garçons. Pourtant, elle connaît le parfum de chaque plante, de chaque fleur. Jamais vu une mémoire pareille ! Elle pourrait être jardinière. Mais ça pour sûr, c’est pas un métier de fille ! 108 L’analyse proposée par Isabelle Nières-Chevrel s’avère donc tout à fait pertinente pour le corpus étudié : « Le dépaysement historique présente l’immense avantage de concilier aventures et exploits exceptionnels, arrièreplan d’une vie quotidienne ‘autre’ et mise en avant de la transmission d’un savoir ; savoir de fait souvent pauvre et stéréotypé, mais qui permet de mettre discrètement en scène les enjeux du présent. » 109 107 Anne-Marie Desplat-Duc, Sorcière blanche, op.cit., p. 164. 108 Annie Pietri, Les Orangers de Versailles, op. cit., p. 12. 109 Isabelle Nières-Chevrel, Introduction à la littérature de jeunesse, Paris, Didier, 2009, p. 103. Titre Éditeur Année Série ou non Desplat-Duc, A.-Marie CSR 110 : Les Comédiennes de monsieur Racine Flammarion 2005 Desplat-Duc, A.-Marie CSR : Le Secret de Louise Flammarion 2005 suite du précédent Desplat-Duc, A.-Marie CSR : Charlotte, la rebelle Flammarion 2006 suite du précédent Desplat-Duc, A.-Marie CSR : La Promesse d’Hortense Flammarion 2006 suite du précédent Desplat-Duc, A.-Marie CSR : Le Rêve d’Isabeau Flammarion 2007 suite du précédent Desplat-Duc, A.-Marie Sorcière blanche Rageot 2008 Jay, Annie Complot à Versailles Hachette jeunesse 1993 Jay, Annie La Dame aux élixirs Hachette jeunesse 2010 suite du précédent Jay, Annie À la poursuite d’Olympe Hachette jeunesse 1995 Jay, Annie Au nom du roi Hachette jeunesse 2006 110 CSR est l’abréviation de Colombes du Roi-Soleil. Dominique Picco 50 Jay, Annie La Vengeance de Marie Hachette jeunesse 2008 suite du précédent Pietri, Annie Les Orangers de Versailles Bayard jeunesse 2000 Pietri, Annie Parfum de meurtre Bayard jeunesse 2009 suite du précédent Pietri, Annie Pour le cœur du roi Bayard jeunesse 2010 suite du précédent Pietri, Annie L’Espionne du Roi-Soleil Bayard jeunesse 2002 Pietri, Annie Le Collier de Rubis Bayard jeunesse 2003 suite du précédent Silvestre, A.-Sophie Course contre le Roi-Soleil Castor poche 2005 Silvestre, A.-Sophie Les folles Aventures d’Eulalie de Potimaron Castor poche 2010 Ténor, Arthur Guerre secrète à Versailles Gallimard 2003 Ténor, Arthur Sabotages en série à Versailles Seuil 2011 Thinard, Florence Mesdemoiselles de la Vengeance Gallimard 2009 Yzac, Adeline Mondane de Fénelon L’hydre 2003 L’éducation des enfants du Grand Siècle 50